Interview Maître de la photo exposé sur la plage de Deauville, Robert Doisneau est à l’honneur ce week-end

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Pour le festival Planches contact, des photos de Robert Doisneau sont exposées sur la plage de Deauville (Calvados), dialoguant avec celles de Malik Sidibé. Francine Deroudille, sa fille et cofondatrice de l’Atelier Robert Doisneau, participe ce samedi 16 décembre 2023 à une rencontre aux Franciscaines sur l’œuvre de ce photographe humaniste qui a marqué les esprits. Rencontre. 

 « Je pense que Robert Doisneau aurait adoré l’idée de cette exposition »

Actu : Sur la plage de Deauville, les photos de Robert Doisneau répondent à celles de Malik Sidibé (lire encadré). Qu’est-ce qui vous a plu ou surpris dans ce dialogue ? 

Francine Deroudille : Quand Laura Serani (directrice artistique de Planches contact, ndlr) a proposé cette idée, avec ma sœur Annette on était absolument folles de joie car on a toujours très envie de le désengluer de l’image d’un photographe passéiste, nostalgique, sentimental… Tout ce qu’il n’était pas.
Je pense que Robert Doisneau aurait adoré l’idée de cette exposition très créative et aurait été enchanté de faire la connaissance de Malik Sidibé. Ils ne se sont jamais rencontrés, mais le travail de Malik Sidibé a tout pour lui plaire. Au-delà des endroits où ils vivaient qui sont fort différents, il y a une fraternité évidente.
Et puis la présentation sur la plage d’immenses tirages, ce qui était inenvisageable avant le numérique : tout est pour nous plaire. 

Un dialogue en images sur la plage

Pour Planches contact, une exposition rapproche deux photographes qui n’ont pas eu le temps de se rencontrer : Robert Doisneau et Malick Sidibé. D’un côté, « probablement le plus populaire et le plus aimé des photographes français », célèbre par son « œuvre immense, faite d’histoire et d’humanité » que l’on découvre à Deauville avec son reportage réalisé sur la construction de golfs de Palm Spring, refuge de riches retraités américains dans le désert du Colorado. De l’autre, Malick Sidibé, célèbre à Bamako et dans toute la région depuis les années soixante, « qui, entre portraits en studio, « bals poussière », et autres festivités a laissé des centaines de milliers de clichés » et que l’on découvre avec sa série de jeunes de Bamako. En bref, « un dialogue entre deux mondes et deux cultures » à découvrir gratuitement jusqu’au 7 janvier. 

On connait Doisneau davantage pour ses photos en noir et blanc. Avec ce travail, on le (re) découvre en couleurs avec cette série photographiée à Palm Springs, en Californie…

FD : Pour nous, ça a été révélateur de la modernité de son travail. Il ne souhaitait pas ne travailler qu’en noir et blanc, mais il le faisait pour des raisons économiques, comme beaucoup d’autres photographes car la couleur coûtait très cher. Il réservait donc la couleur pour les commandes où tout était financé, et dès qu’il pouvait le faire, il en était ravi. 
Il s’est rendu à Palm Springs, dans un endroit haut en couleur, pour une commande du magazine américain Fortune. Là-bas, il a eu l’impression d’avoir fait un travail de commande comme les autres, en débordant pourtant beaucoup. La commande initiale concernait la construction des golfs à Palm Springs, mais quand il est arrivé sur place, il s’est trouvé face à des gens qui l’ont fait complètement halluciner, d’une gentillesse incroyable, tous plus riches les uns que les autres et dans l’inactivité complète. Ça a donné ces photos qui ressemblent plus à du Martin Parr qu’à du Doisneau. Ça nous plaisait justement de montrer l’adaptation de son regard et de ses techniques.

On retient que c’est toujours l’humain qui prédomine dans son travail ? 

FD : Exactement, ce qui l’a toujours intéressé c’est de photographier les gens, pas les gazons (rires). 

Francine Deroudille et Robert Doisneau
Francine Deroudille et Robert Doisneau (©Collection Robert Doisneau)

« Une œuvre photographique vous fait voyager »

Comment vous a-t-il transmis cet amour de l’image ? 

FD : Il ne me l’a pas transmis du tout car quand j’étais jeune, la photo ne m’intéressait pas. C’était le métier de mon père, il y en avait partout et on vivait dans une espèce de roulotte photographique. Les hasards de la vie ont fait qu’en 1980, Raymond Grosset, qui dirigeait l’agence Rapho qui distribuait les photos de mon père, m’avait dit : tu devrais venir à l’agence pour voir comment se passe la diffusion des photos.
J’ai fini par accepter cette demande, je suis allée travailler à l’agence en pensant rester six mois pour comprendre comment se passait cette diffusion d’images. J’ai eu l’impression d’entrer dans ma famille, pas seulement par les photos de mon père, mais par d’autres photographes dont j’ai adoré le travail. En restant dans votre fauteuil, une œuvre photographique vous fait voyager, on part dans d’autres univers. Du coup, je ne suis pas restée six mois, mais 20 ans. C’est là qu’est née la passion. Le métier de diffusion d’images, c’est un métier de contact, une grande famille de foi. 

Finalement, vous partagez avec votre père votre passion de l’image, mais aussi de l’humain…

FD : L’intérêt aux autres est une des solutions au grand malaise de la vie. 

« Il y a beaucoup plus de passion que de sacrifices »

Vous avez co-fondé l’Atelier Robert Doisneau avec votre sœur Annette. Votre mission est donc que l’œuvre de votre père ne tombe pas dans l’oubli ? 

FD : En dehors du fait que mon père était quelqu’un de délicieux et que si ça avait été un vieil emmerdeur on n’aurait sûrement pas continué à travailler sur ses collections, ce qui m’intéresse et ce que je trouve extraordinaire, c’est de voir se constituer une œuvre. Une vie, c’est très matériel, c’est du quotidien, une succession de problèmes à régler et de difficultés. Les gens qui arrivent par la photo, la peinture ou l’écriture par exemple, à construire quelque chose qui a une logique artistique, sur qui on peut dire à la fin de leur vie qu’ils ont réussi à construire quelque chose qui ressemble à eux et à personne d’autre, ça force l’admiration. J’ai eu cela à domicile et je pense qu’il ne faut pas gaspiller les cadeaux de la vie comme ça.
C’est ça qui m’intéresse : continuer à regarder les images, à comprendre ce monde qui n’est plus, mais qui est tout de même celui qu’on vit aujourd’hui. Il ne faut pas gaspiller les collections photographiques, il faut essayer de les respecter au maximum et de les faire comprendre parce que ça nous apporte un autre regard sur le présent. 
Je ne me suis pas sacrifiée pour les photos de mon père, c’est un travail de s’occuper d’une collection. Je n’ai pas l’impression d’être la boniche de l’œuvre de mon père (rires). Il y a beaucoup plus de passion que de sacrifices. 

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Rencontre samedi 16 décembre, à 16 h, aux Franciscaines, à Deauville. Tarif : 5 € ou gratuit pour les abonnés. 

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