Une palette d’arts
Est-ce la lumière dorée du Gers ou ses paysages verdoyants qui ont inspiré les artistes de la Villa de Séviac ? Toujours est-il qu’ils ont laissé en héritage de somptueuses mosaïques dans ce domaine gallo-romain du IVe siècle. Il s’agit là des premières traces artistiques visibles dans le Gers. Il faut ensuite attendre le Moyen Âge et la construction de chapelles, d’églises et de châteaux pour voir les murs se couvrir de fresques et de sculptures. La religion est intimement mêlée au développement des arts dans le Gers. L’Astarac rend hommage à ce mécénat à travers une « Route des peintures murales et sculptures » qui mène aux églises les plus intéressantes des environs. L’essentiel des œuvres remontent au Moyen Âge, comme en attestent la fraîcheur et la naïveté de certaines scènes. Les amateurs d’art sacré ne manqueront pas la première figuration d’un pèlerin pour Saint-Jacques à la Collégiale Saint-Nicolas de Nogaro ni les retables en pierre de la Chapelle Notre-Dame-des-Anges à Miramont-Latour et de l’église Notre-Dame-de-Pitié à Biran. L’abbaye de Flaran bâtit un pont entre religieux et classique avec la somptueuse collection Simonow. Ce philanthrope britannique a mis en prêt jusqu’en 2021 des chefs-d’œuvre du XVIe au XXe siècle. Cézanne, Renoir, Matisse, Picasso, Monet, Braque, Rodin…. Les plus grands maîtres y figurent. L’art contemporain trouve sa place dans le Gers grâce à l’excellent travail du Centre d’art et de photographie de Lectoure, soutenu par le Ministère de la Culture. Axé principalement sur la photographie, il invite des artistes en résidence et propose des expositions au regard singulier tout au long de l’année. L’Été Photographique, rendez-vous incontournable des amateurs d’art contemporain, présente photographes, vidéastes et plasticiens prometteurs ou confirmés dans les sites patrimoniaux de la ville.
Inspiration Gers
Si les résidents du Centre d’art et photographique de Lectoure exposent le fruit de leur travail, ils ne sont pas les seuls à être inspirés par le Gers. Durant l’été, les expositions foisonnent dans les mairies, les galeries d’art et les restaurants, laissant entrevoir la vivacité des artistes gersois. Ils sont nombreux à s’être installés dans le département en raison de la qualité de sa lumière, de la douceur et de la beauté mélancolique de ses paysages, inépuisables sources d’inspiration. Marco Cavaglieri, le plus célèbre d’entre eux, dépeint une société bourgeoise en proie aux doutes dans les Années Folles. Ses toiles colorées et foisonnantes cachent mal la lassitude et la mélancolie de ses personnages. Né en 1887 à Rovigo en Italie, il s’installe dans le Gers en 1925. Il délaisse les portraits mondains qui l’ont fait connaître pour s’attacher aux paysages gersois. Sa toile Peyloubère plage, après le bain (1933), exposée au Musée des Amériques à Auch, est sans doute l’une des plus réussies. Cavaglieri décède dans sa maison de Peyloubère en 1969, laissant derrière lui un regard bienveillant sur sa patrie d’adoption. Sa demeure, classée monument historique, a été transformée en gîte et chambre d’hôtes. Christian Gardair, lui, ne s’est jamais enraciné dans le Gers où, enfant, il fut réfugié du côté d’Eauze. Mais le Girondin, né en 1938, le conserve chevillé au cœur et garde un tel souvenir de cet épisode de sa vie qu’il en a fait l’un des thèmes majeurs de son œuvre artistique. « Jamais n’est mort en moi l’enfant qui s’en allait à pied à travers champs apprendre à lire et à compter par pommes et allumettes interposées, dans l’admirable paix gersoise alors même que la Shoah faisait rage. » a-t-il écrit. En 2019 et 2020, le paysagiste américain de la lumière Marc Dalessio pose ses pinceaux en Lomagne. Il tire de ses séjours une série d’huiles bucoliques et douces et confesse : « le Gers est vraiment une région sensationnelle pour la peinture des paysages et je ne saurais que le recommander à ceux qui cherchent un endroit pittoresque pour le travail en plein air. »
Les grandes figures locales
Avec sa lumière exceptionnelle et ses panoramas ondulants, on pourrait imaginer que le Gers a produit des paysagistes capables d’en saisir la subtilité. Mais il n’en est rien. C’est dans l’art du portrait que le plus illustre des peintres gersois a laissé exploser sa créativité. Jean-Paul Chambas naît le 11 mars 1947 à Vic-Fezensac. À seulement 20 ans, il accroche ses premières toiles dans une galerie toulousaine. Deux ans plus tard, il se penche sur la figuration narrative et part pour Milan sur les traces d’Arthur Rimbaud à qui il consacre plusieurs séries. Inspiré par les écrivains, il aborde ses œuvres comme le toréro descend dans l’arène : « Que ce soit Kafka, Lowry ou Rimbaud, je veux tout savoir d’eux. […] J’ai besoin du sujet pour me l’approprier et après je le tue. […] À la sortie, si c’est réussi, la peinture doit bouffer le sujet. C’est un combat. » Touche-à- tout de génie, il met la même ardeur dans la création de ses décors de théâtre. Carmen, monté en 1993 à l’Opéra-Bastille, le consacre. Son génie puissant peut être admiré à la station Chaussée-d’Antin à Paris ou Mermoz à Toulouse. Autre portraitiste gersois de renom, Gustave de Galard naît à L’Isle-Bouzon en 1779 et mène une vie rocambolesque. Obligé de fuir la Terreur à seulement 15 ans, il embarque pour les Petites Antilles depuis l’Espagne. Il se met à la peinture pour vivre et se forge une réputation dans l’art de la miniature. Il rentre en France en 1802 et s’essaye à la lithographie, puis à la caricature, ce qui lui vaudra un séjour en prison pour avoir égratigné Louis-Philippe. Libre, il reprend les pinceaux et devient le portraitiste attitré des bourgeois de Bordeaux. Certaines de ses toiles peuvent d’ailleurs être admirées au musée des Beaux-Arts de la ville. Le talent de Paul Noël Lasseran ne l’a pas hissé dans les musées mais l’a poussé dans les églises. Ce fils de sculpteur et peintre né à Lectoure en 1868 débute comme peintre en bâtiment avant de s’essayer au trompe-l’œil. Il affine son coup de patte académique sur les murs de la Taverne du Bastion où il a ses habitudes. Repéré par les édiles locaux, il est invité à restaurer les fresques de plusieurs églises : Goutz, Castet-Arrouy, Saint-Pierre d’Aubézies, Masseube ou encore la chapelle des Carmélites de Lectoure.
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