Le musée du Louvre raconte la folle histoire des fous dans l’art, de Bosch à Quasimodo

Pourquoi la « folie », à travers ses manifestations réelles ou parodiées, devint-elle un thème sociétal central du XIIIe au XVIe siècle, période de passage du Moyen Âge à la Renaissance? Et qu’entendait-on par « folie » avant que celle-ci, à l’époque moderne, ne fût reconnue maladie mentale? C’est à ces interrogations que répond cette exposition placée sous le double commissariat d’Élisabeth Antoine-König et de Pierre-Yves Le Pogam, conservateurs au musée du Louvre.

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Le fou, repoussoir du chrétien

Dans l’univers médiéval, le « fou », vu comme un être privé de conscience chrétienne, se trouvait exclu de la communauté des fidèles. Enfermée dans la dualité commode bien/mal, la folie fut néanmoins reconsidérée par l’humanisme propre à l’âge gothique qui, dans les arts, suscita une véritable ivresse de figuration humaine. Si la folie s’invita dans les portails sculptés à travers des allégories et scènes de diableries, son évocation fut plus massive dans l’enluminure ainsi que dans le décor intérieur civil.

Maître de 1537, Portrait de fou regardant à travers ses doigts, entre 1548 et 1570, huile sur bois, 48,4 x 39,6 cm, Anvers, the Phoebus Foundation.

Maître de 1537, Portrait de fou regardant à travers ses doigts, entre 1548 et 1570, huile sur bois, 48,4 x 39,6 cm, Anvers, the Phoebus Foundation.

Succédant aux monstres de l’art roman, les êtres grotesques qu’on y rencontrait symbolisèrent, avec des attributs et attitudes propres, une folie certes redoutée mais autant apprivoisée que vouée aux gémonies. Au sein d’une frontière floue entre folie et normalité, des humains voués sans limites à Dieu accédèrent alors au rang supérieur de « fous » de Dieu. L’amour profane entre les sexes ne bénéficia pas d’une telle mansuétude et, dans les romans de chevalerie, les auteurs se plurent à souligner des aveuglements assimilables à l’emprise de la folie.

La folie s’invite à la cour

En osant regarder en face les excès attribués à la folie, la société se mit également à jouer au fou dans des fêtes spécifiques ainsi qu’à la cour avec des bouffons qui pouvaient explorer, sous couvert de folie, les rameaux secrets liant raison et déraison, ordre et désordre, obéissance et subversion.

Konrad Seusonhofer, Casque d’une armure envoyée par Maximilien à Henri VIII, v. 1511-1514, fer gravé et doré, 33,5 x 48,5 x 37 cm, Leeds, Royal Armouries Museum.

Konrad Seusonhofer, Casque d’une armure envoyée par Maximilien à Henri VIII, v. 1511-1514, fer gravé et doré, 33,5 x 48,5 x 37 cm, Leeds, Royal Armouries Museum.

En tenant compte de cette dualité féconde dans les rapports humains, la Renaissance franchit le pas d’une relativisation de la folie avec l’idée que le monde commun pût être celui de fous qui s’ignoraient. Dans son Éloge de la folie, édité à Paris en 1511, Érasme (1466?-1536) mit en évidence les liens entre vérité et folie, de même qu’Albrecht Dürer (1471-1528), avec sa gravure de la Mélancolie (1514), reconnut le rôle moteur pour la création intellectuelle et artistique d’une folie mise au service de l’esprit.

Francisco José de Goya y Lucientes, L’Enclos des fous, 1794, huile sur étain, 42,9 x 31,4 cm, Dallas, Meadows Musuem. ©photo Robert Laprelle.

Francisco José de Goya y Lucientes, L’Enclos des fous, 1794, huile sur étain, 42,9 x 31,4 cm, Dallas, Meadows Musuem. ©photo Robert Laprelle.

En guise d’épilogue, cette foisonnante et captivante exposition évoque le XIXe siècle romantique dont maints artistes renouèrent le fil entre folie et création : avec eux, la folie, complice, trouvait ses lettres de noblesse définitives !

« Figures du fou. Du Moyen Âge aux romantiques »
musée du Louvre, hall Napoléon, rue de Rivoli, 75001 Paris
du 16 octobre 2024 au 3 février 2025


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